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Le projet de loi sur l’aide à mourir revient en examen au Parlement le 12 mai 2025. Deux propositions de loi distinctes, une sur les soins palliatifs et l’autre sur l’aide à mourir, devraient être examinées et soumises au vote courant mai 2025. La version proposée sur l’aide à mourir reprend une part substantielle des amendements issus des débats parlementaires de 2024. Si ces derniers ont été jugés constructifs, ils ont curieusement ignoré la question économique de la fin de vie et son impact social.
C’est ce que nous allons aborder ici. Mais avant cela, il est utile d’exposer la position personnelle de l’auteur sur ce type de sujet. La nature du sujet nous amène à préciser d’où nous parlons.
Une mesure « a priori » progressiste
Notre position sur les sujets sociétaux est que tout nouveau droit qui renforce la souveraineté et la liberté de l’individu dans ses choix de vie constitue, a priori, un progrès humain souhaitable.
Comme Rousseau, nous pensons que « L’homme est né libre et partout il est dans les fers », chaque chaîne que l’on peut délier est, a priori, une avancée salutaire.
Comme Sartre, nous constatons que « l’homme est condamné à être libre », y compris, a priori, en fin de vie.
Une fois cette position personnelle révélée, il s’agit d’analyser avec la rigueur nécessaire la réalité du progrès humain proposé, en considérant notamment les plus fragiles et l’applicabilité concrète de cette proposition.
Cette analyse implique d’abord d’examiner le contexte actuel de notre protection sociale, ensuite, de mesurer l’influence de la question économique sur la fin de vie et, enfin, de s’interroger sur l’existence d’un cadre éthique solide encadrant l’aide à mourir.
Un ordre des priorités politiques étonnant
L’examen du projet de loi de l’aide à mourir coïncide, à quelques semaines près, avec le vote d’une loi de financement de la sécurité sociale 2025 qui n’a pas réussi à garantir la viabilité financière de notre sécurité sociale à moyen terme.
La trajectoire budgétaire des budgets sociaux, votée en février dernier, montre un déficit structurel annuel de 24 milliards d'euros, entraînant d’ici à 2028 une hausse de près de cent milliards d'euros d’une dette sociale, qui s’élève déjà à 150 milliards d'euros à fin 2024.
Si les Français ne perçoivent pas immédiatement la dette de l’État comme une menace directe pour leur avenir, le principe de réalité économique s’impose : un tel niveau d’endettement social représente une menace existentielle pour le financement solidaire de notre protection sociale,en réalité donc la protection de chaque citoyen face aux principaux risques sociaux.
Le budget des dépenses publiques de santé est, de loin, le plus déficitaire parmi les budgets sociaux, représentant à lui seul 80% du déficit annuel de la sécurité sociale d’ici à 2028.
Cette situation budgétaire est inédite depuis la création de la sécurité sociale et n’est pas soutenable. A ce jour, le financement de la dette sociale à venir n’est plus garanti, remettant en cause l’existence même de la sécurité sociale dans les prochaines années, sans réforme.
Cette situation soulève une question fondamentale sur l’ordre des priorités politiques en matière de droits sociaux : ne faudrait-il pas d’abord sauver notre modèle de protection sociale solidaire, afin d’assurer une couverture à tous les citoyens, avant d’envisager la création d’un nouveau droit d’aide à mourir ?
Inégalités sociales de santé et fin de vie
Au-delà de la survie économique du modèle social, l’amélioration de son efficacité en matière de justice sociale pourrait être jugé prioritaire. Notre pays est marqué par un haut niveau d’inégalités sociales de santé, que la crise profonde actuelle du système ne peut qu’aggraver.
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