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Pour Sans Doute, Pierre-Etienne Franc rappelle que les tractations diplomatiques et influences politiques pesant en ce moment sur la Conférence pour le Climat (COP30), qui va se tenir à Belém, au Brésil, du 10 au 21 novembre 2025, peuvent à certains égards rappeler quelques coups de poker dans notre histoire récente.
Au moment de la crise du Congo(1) en décembre 1960, alors que les Occidentaux s’efforçaient de jouer le jeu de l’indépendance sans vraiment la donner - face à un Patrice Lumumba devenu héros des mouvements d’indépendance - et pendant que le mouvement des non-alignés commençait à prendre un poids singulier, alors même que le nombre de pays du continent africain rejoignant l’ONU tendait à faire basculer les équilibres, Khrouchtchev tenta un coup de poker assez brillant. Pour mettre les Américains et plus généralement les puissances occidentales face à leurs contradictions sur le sujet de l’émancipation des peuples, et pour gagner quelques points dans la lutte d’influence, il proposa à l’Assemblée générale de l’ONU le 14 décembre 1960 une résolution sur le droit à l’indépendance des peuples colonisés.
Dans le même temps, les Américains soutenaient les Belges, qui les utilisaient pour tenter de garder un semblant de contrôle sur le Congo et au moins sur le Katanga, État soudainement auto-déclaré qui va faire discrètement sécession, pérennisant ainsi l’accès des Occidentaux à l’uranium. L’Union Minière du Haut-Katanga détenait des gisements d’uranium qui avaient déjà servi au projet Manhattan pour les premières bombes nucléaires américaines et l’essor du nucléaire civil 15 ans plus tôt. La résolution 1514 fut adoptée et devint l’une des plus importantes de l’organisation dans le processus de décolonisation des peuples. Les États Unis ne pouvaient pas voter « contre » alors qu’ils n’avaient eu de cesse de pousser les peuples à l’indépendance, en vantant la culture américaine à l’aide de Dizzy Gillespie et « Satchmo » Armstrong, mais voter « pour » aurait signifié servir la soupe un peu trop nettement aux Soviétiques et Chinois en pleine phase d’expansion africaine. Le camp soviétique et les non-alignés en sortirent renforcés, tandis que les Américains furent contraints à l’immobilisme : laisser le jeu se faire, sans interférer[1].
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