Partager cet article
C’est un moment d’anthologie que seul le sport peut nous offrir. Dimanche soir, dans une lumière crépusculaire, les dieux du tennis se sont penchés sur Roland Garros. Un moment de grâce, une finale hors du commun. La plus longue à Paris. Et la plus belle, sans l’ombre d’un doute. Jamais le dernier match de notre quinzaine printanière préférée n’avait basculé ainsi dans l’irrationnel et le sublime. Carlos Alcaraz et Jannik Sinner nous ont enchantés pendant 05h29 d’un combat de titans où l’Espagnol aura trouvé un invraisemblable supplément d’âme et de génie.
Direction le Panthéon
Depuis la terrasse Prime Video, qui domine le court Philippe Chatrier et où j’ai le bonheur d’officier depuis 5 ans, je n’ai eu cesse de me demander si on avait déjà vu ça. À mes côtés, Jo-Wilfired Tsonga et Marion Bartoli n’en finissaient plus de crier au gag ou à la plaisanterie tant le niveau de jeu était choquant. Le cinquième set, mesdames, messieurs, est en effet à ranger au panthéon du tennis. Un monument. Un chef d’œuvre. Une enfilade de coups supersoniques. Une pléiade de passings gagnants. Une cavalcade d’inspirations géniales. À l’issue d’un super tie-break aussi indispensable à la dramaturgie que fantasmagorique pour Alcaraz et abominable pour Sinner, le doute n’était plus permis : Roland Garros n’a jamais connu ça !
Cette finale monumentale est même d’ores et déjà à classer parmi les plus grands matches de l’histoire de ce sport comme, entre autres : Borg-McEnroe 1980 à Wimbledon, Federer-Nadal 2008 toujours sur le gazon londonien, Nadal-Djokovic 2012 en Australie ou encore le Federer – Djokovic de 2019 encore à Wimbledon. Des duels épiques où les planètes s’alignent au fil du match pour nous offrir tous les ingrédients qui font la légende. Si nos pouls battaient sans doute plus vite pendant un Federer-Nadal, par exemple, le temps fera son œuvre. Alcaraz et Sinner sont entrés ce dimanche dans le foyer des Français et dans le cœur de beaucoup de jeunes et moins jeunes amateurs de tennis. Cette rivalité s’annonce aussi pérenne que radieuse. Et une excellente raison de continuer à aimer le tennis.

À la bonne ère !
Mais, franchement, comment ne pas avoir de l’empathie pour Jannik Sinner et ses trois balles de titre envolées ? Depuis Coria et ses crampes en 2004, aucun champion n’avait connu pareille cruauté en finale Porte d’Auteuil. Il était pourtant le plus fort pendant près de quatre heures de jeu. Il tenait la coupe des Mousquetaires avec neuf de ses dix doigts. Mais le tennis est ainsi fait, surtout dans ce merveilleux format au meilleur des cinq sets, qu’il est impossible de s’y voir avant. L’Italien rejouera très longtemps ses trois occasions, où il a commis trois fautes (!), dans sa tête. La cicatrice ne se refermera que quand il gagnera ce tournoi. Ce qui arrivera un jour.
Pour l’heure, rendons aussi l’hommage qu’il mérite à ce génial jeune homme venu de Murcie. Déjà 5 titres du Grand Chelem à seulement 22 ans…seuls Nadal et Borg ont fait mieux. C’est dire si Alcaraz a du talent à revendre. Il est un enchantement pour ce sport et le plaisir qu’il prend fait le nôtre. Le voir distiller ses amortis, ses coups droits ou ses volées, en cherchant toujours à créer, est une bénédiction pour le tennis. Comme son sourire.
Et dire qu’au début de ce Roland Garros 2025, nous disions officiellement au revoir à la légende vivante Nadal et ses 14 titres à Paris. Et dire qu’en demi-finale, Novak Djokovic quittait lui le court d’une manière énigmatique en embrassant la terre battue parisienne…La plus belle page de l’histoire du tennis masculin est officiellement en train de se tourner sous nos yeux. Mais, j’en suis désormais certain, le prochain chapitre ne sera pas banal, loin de là.