C’est celui de ma jeunesse. Celui que je prenais les jours de pluie pour éviter de remonter tout le Faubourg Montmartre. Comme ont dû le faire des millions de personnes avant moi depuis que ces passages existe à la toute fin du XVIIIe siècle. Mais c’est bien plus tard que j’ai compris leur charme, leur beauté et leur différence.
Comme chaque année, arrivant porte d’Auteuil, dans le seizième arrondissement, presque sept-cents mille personnes -dont j’ai fait partie – n’ont eu qu’une idée en tête : arriver le plus vite possible dans la Mecque de leur sport favori : le tournoi de Roland Garros.
Ils ont longé l’une des grilles d’un jardin pas comme les autres. Trop hâte d’aller droit devant pour regarder autour de soi ; ne serait-ce que quelques secondes afin d’attiser une fugace curiosité.
Je les vois remonter vers la place du Tertre, direction le Sacré-Cœur. Pour une vue sur Paris à nulle autre pareille. C’est à peine si, en passant, ils ont jeté un œil à la bannière indiquant le musée de Montmartre. Trop occupés à trouver le meilleur angle pour leurs selfies. On n’est pas là pour admirer Paris à ses pieds, rêver de la ville la plus glamour ou regarder un à un les monuments qui s’offrent au loin. On est juste là pour « faire la Butte ». Et on repart, pas de temps à perdre.
Sans nom puisqu’anonyme. Dans ce qui étaient alors, au XVIe siècle, les faubourgs sans âme de Paris. En face du palais du Louvre, mais si loin pourtant. Quartier de misère, un autre monde que celui qu’elle voyait dans l’île de la Cité ou le pouvoir se disputait à coup de dague, de poison ou de noyade. Une maison de gueux, peut-être un bordel, où les jeunes clercs, fraîchement tonsurés, venaient cacher leurs turpitudes alcoolisées entre deux catins aux mains lestes. Mais, peut-être également, des belles aristocrates venues combler leurs amants sans risquer l’exil de l’une et la mort par l’épée ou la hache de l’autre.
Surtourisme ! Ce mot fabriqué pour l’occasion évoque bien la cohorte, toujours grandissante, de personnes en bermudas et t-shirt plus ou moins propre, qui envahissent Paris ; dès le printemps maintenant, effet JO et canicules récurrentes oblige. Pourtant Paris, la ville où je suis né, cache tellement d’endroit aussi beau qu’inattendus que l’on pourrait passer des semaines à les trouver et tomber sous leur charme. À condition toutefois d’aimer vraiment notre ville.Petit florilège de nos trésors cachés.